[Lecture] – Andrzej SAPKOWSKI, Le Sorceleur [1] : Le dernier vœu

« A travers les plaines arides et les montagnes escarpées des Royaumes du Nord, un homme avance seul. En ces temps obscurs, il est l’un des rares à ne pas craindre les terribles créatures qui croisent sa route. Car Geralt de Riv est un sorceleur : un mercenaire initié aux secrets d’une ancienne magie. Il suit son propre code de l’honneur dans un monde qui a oublié le sien, avec l’espoir inavoué de réaliser son dernier vœu : retrouver son humanité. »

[En bref] Si je devais qualifier le style de ce livre, je dirais à la fois barbare, cru, magique, dangereux et inquiétant. Mais aussi très attachant, curieux, infaillible et juste.  Il est tellement agréable de marcher dans les pas du Sorceleur, que j’ai eu beaucoup de mal à le lâcher. Ce recueil est une ouverture, un appel aux questionnements pour la suite des aventures de Geralt. Ce qui réveille inévitablement l’envie d’aller plus loin dans cette saga. [★★★★ / 5]

L’homme est unique. L’univers est magique. Le récit est addictif.

blabla

Après quelques romans de vie et d’amour, je me décide à changer de style et à revenir dans mon registre de prédilection : la fantasy.

Cela fait maintenant de nombreuses années que je croise Le Sorceleur dans les rayonnages mais la couverture des éditions Milady ne m’a jamais bien motivée. Il y a quelques semaines maintenant, j’ai trouvé une version beaucoup attrayante et très récente : celle des éditions Bragelonne. Le type de couverture est tellement classe !

Je n’ai donc pas réfléchi bien longtemps en magasin, et je suis repartie directement avec les livres 1 & 2, ainsi que le tome dit 0,5. Ne sachant toutefois pas par lequel commencer, j’ai dû regarder et chercher conseil sur quelques sites internet par-ci par-là, avant de faire mon choix : je débute donc cette saga avec le LIVRE 1 – Le dernier vœu.

 

‹ Andrzej SAPKOWSKI, Le Sorceleur [1] – Le dernier vœu ›

Style : Fantasy.
Editions : Bragelonne.
Pages : ~305.

Sorceleur 1
Le Sorceleur [1] – Le dernier vœu :  ★★★★ / 5

La toute première chose à savoir et à comprendre pour ce premier tome de la Saga du Sorceleur, c’est que nous avons là un recueil de nouvelles. Effectivement, le livre est séparé de plusieurs chapitres au titres différents et dans lesquels sont mises en scènes des histoires différentes. Au fil des pages, et donc de ces nouvelles, nous découvrons un Geralt de Riv dans son quotidien. Ce qu’il est, ce qu’il fait, ce pourquoi il le fait.

En bref : Le héros, Geralt, est un Sorceleur. Cette condition consiste à débusquer mutants et créatures maléfiques qui sèment la terreur afin de les désenvoûter ou, dans le pire des cas, de les tuer. Pour cela, il est bien sûr doté de plusieurs qualités dont force barbare et pouvoirs magiques. Nous le suivons donc dans sa vie de tous les jours où il met en avant toutes les compétences qui requièrent et qualifient cette « profession ». Et c’est ainsi qu’il gagne sa vie : en parcourant le pays d’un bout à l’autre et en faisant régner une sorte de justice vis à vis de l’humanité, en redonnant un équilibre entre le bien et le mal.

Notons toutefois que Geralt est un homme seul, qui suit, comme écrit dans le résumé officiel, son propre code de l’honneur. Il nous apparait comme froid, dénué de sentiments, barbare et féroce, mais tout de même juste. Et bien qu’il agisse pour son propre compte, il tient à aider hommes et femmes qu’il croise sur son chemin. Il n’a pas peur des conflits, se bat d’ailleurs avec une précision exemplaire, et se place en avant de tout danger, au risque d’en perdre la vie. Mais il est toujours confiant lorsqu’il s’engage dans un combat et ne baisse jamais les bras.

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Premiers Mots – La voix de la raison 1

Elle arriva chez lui au petit matin. Elle entra discrètement, tout doucement, à pas feutrés, flottant dans la pièce comme un fantôme, un spectre.

Premiers Mots – Le Sorceleur

On raconta par la suite que l’homme était arrivé par le nord, par la porte des Cordiers. Il allait à pied, menant par la bride son cheval chargé de bagages.

Voici ici les premières phrases des deux premiers chapitres du roman. Je trouvais sympathique de pouvoir les comparer. Effectivement, nous avons là deux personnages dont on ignore encore l’identité. Une femme : discrète et légère, tout en douceur. Un homme : que l’on suppose imposant, fort et bien présent.

On imagine facilement deux situations différentes. Une entrée furtive, et une entrée qui ne passe pas inaperçu. A ce stade, on peut se demander :

1/ Que va donc faire la femme ? Pourquoi arrive-t-elle si doucement ? Est-ce dans le but de nuire ? Avec l’impression de flotter dans la pièce, qui est-elle finalement ?
2/ Cet homme ressemble à un vagabond, pourquoi ? Quelle est son identité ? Que vient-il faire ici avec tant de bagages ? Est-ce quelqu’un de bon ou de mauvais ?

Quoiqu’il en soit, c’est un appel à découvrir la suite afin de répondre à ces questions.

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avis

J’ai été plutôt décontenancée au cours de la lecture des premières pages de ce livre, dans le sens où il était difficile de comprendre qui étaient les personnages, et ce qu’ils faisaient dans leur vie. On parle de créatures et de mutants, de sorceleur et de magiciens, d’hommes et de femmes tout à fait normaux tels que des rois, des marchands ou des maires. On est perdus. Mais très vite on prend conscience de l’univers qui entoure tout ce petit monde : nous sommes plongés dans des contrées lointaines et sauvages ou le mal ravage le quotidien des humains. Heureusement, il existe au sein de cette communauté, des hommes, à l’instar de notre cher Geralt de Riv, qui sont là pour faire régner la paix et l’équilibre entre mutants et humains.

L’univers dans lequel nous plonge ce récit est à la fois rustique et bestial. Nous nous situons probablement dans une époque de style moyen-âge ou la plupart des conflits sont gérés par les armes bien plus que par la parole. Les termes employés tout au long du livre sont d’ailleurs en totale adéquation avec la période, parfois pompeux, parfois crus ; l’auteur ne mâche pas ses mots pour nous faire comprendre qui règne en maître dans ces contrées sauvages.

Geralt, comme je l’ai décris plus haut, est un personnage qui nous apparait à la fois comme froid et juste. Dès les premières pages nous sommes intrigués face à un tel héros. Est-il réellement bon ou agit-il uniquement dans son propre intérêt ? Très vite, nous nous attachons à cet homme seul et nous n’avons qu’une envie : qu’il puisse résoudre les problèmes dont il doit faire face à temps et sortir vainqueur de ses nombreux combats. Maniant le glaive, les signes et les mots à la perfection, il exerce sa profession de sorceleur avec beaucoup de habileté et d’excellence – il est en est d’ailleurs très connu. Jamais il n’acceptera un travail qui irait à l’encontre de ses valeurs et ses convictions. Son jugement est implacable, ses combats inégalables. Et bien qu’on l’imagine barbare et féroce malgré tout, nous découvrons au cours du récit, qu’il se sent comme prisonnier de sa condition. Ce qui le rend encore plus attachant.

J’ai beau détester de manière générale les nouvelles, et accessoirement, les recueils de nouvelles, j’avoue être agréablement surprise par cet ouvrage. Certes, nous avons là plusieurs histoires différentes, mais qui finalement, mises bout à bout, offrent au lecteur l’étonnante satisfaction d’avoir entre les mains un « presque-roman ». Chaque récit (au nombre de 5) sont entrecoupés par un autre, principal et décliné en 7 parties, dans lequel nous apprenons au fil des pages qui est Geralt de Riv, ce qu’il ressent, ce qu’il a vécu, ce pourquoi il agit d’une manière ou d’une autre.

Nous n’avons donc pas, entre les mains, quelque chose qui suit une trame toute définie et dont l’avancée est claire et précise, il n’y a pas vraiment de fil conducteur, mais cela nous permet de nous faire notre propre idée des conditions et des évènements passés ou à venir. On a l’impression d’être libres, de pouvoir réellement penser ce que l’on veut.

Si je devais qualifier le style de ce livre, je dirais à la fois barbare, cru, magique, dangereux et inquiétant. Mais aussi très attachant, curieux, infaillible et juste.  Il est tellement agréable de marcher dans les pas du Sorceleur, que j’ai eu beaucoup de mal à le lâcher. Tout simplement parce que j’ai eu vraiment hâte de découvrir ses aventures (et mésaventures) au travers de ces nombreuses petites histoires. Ce recueil est une ouverture, un appel aux questionnements pour la suite des aventures de Geralt. Ce qui réveille inévitablement l’envie d’aller plus loin dans cette saga.

 

Et bien évidemment, je recommande cette saga.
L’homme est unique. L’univers est magique. Le récit est addictif.

 

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Extraits pour découvrir cet univers barbare –

[#1 – p 79] Géralt bondit. Comme mû par un ressort. Chaque geste, chaque pas qu’il lui fallait faire maintenant était dans sa nature, il le maitrisait à la perfection ; chaque geste, chaque pas était prévisible, automatique et d’une assurance meurtrière. Trois pas rapides. Le troisième pas, ferme, décidé, comme les centaines de pas qu’il avait effectués auparavant, se termina sur le pied gauche. Une torsion du tronc, une botte prompte, vigoureuse. Il vit les yeux de la brouxe. Désormais, plus rien ne pouvait changer. Il entendit sa voix. Rien. Il poussa un cri pour étouffer le mot qu’elle répétait. Le mot ne pouvait plus rien. Il frappa.

 

[#2 – p95] – Stregobor ! dit Geralt. Ainsi va la vie. On voit toutes sortes de choses quand on voyage. Des paysans qui s’entre-tuent pour une borne au milieu d’un champ, que les escouades de deux régents fouleront le lendemain pour s’y massacrer les uns les autres. Le long des routes, des pendus se balancent aux arbres ; dans les forêts, des bandits coupent la gorge des marchands. Dans les villes, on trébuche à chaque pas sur des cadavres abandonnés dans les caniveaux. Dans les châteaux, on se transperce à coup de poignard, et lors des banquets, c’est sans arrêt que l’on voit l’un ou l’autre convive rouler sous la table, empoisonné. Je m’y suis habitué. Alors pourquoi une mort qui menace quelqu’un devrait-elle me bouleverser, de surcroît, quand il s’agit de toi ?

 

[#3 – p188] – Les gens, dit Geralt en détournant la tête, aiment bien inventer des monstres et des monstruosités. Ça leur donne l’impression d’être moins monstrueux eux-mêmes. Quand ils boivent comme des trous, qu’ils escroquent les gens, les volent, qu’ils cognent leurs femmes à coups de rênes, laissent crever de faim la vieille grand-mère, qu’ils assènent un coup de hache à un renard pris dans un panneau ou criblent de flèches la dernière licorne qui subsiste sur terre, ils aiment se dire que la Moire qui entre dans les chaumières au point du jour est plus monstrueuse qu’eux. Alors ils se sentent le cœur plus léger. Et ils ont moins de mal à vivre.

 

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